C’est comme réalisateur que Frédéric Fournier s’est d’abord investi sur Kebec. Celui dont le CV passe par le divertissement jeunesse et la télé-réalité, de Code F à Family Feud Canada, a trouvé sa niche en documentaire.
S’il a débuté sa carrière en travaillant sur des musicographies à MusiquePlus, il se plonge depuis quelques années dans l’histoire du Québec avec la série Kebec qui en est à sa 5e saison. Frédéric aime brasser des idées, ce qui explique sa passion pour les moments forts de notre histoire et ceux qui les ont provoqués.
Photo fournie par Télé-Québec
En quoi le ton installé avec Kebec est-il important ?
Nous étions conscients dès le début qu’on associe malheureusement l’histoire à quelque chose de poussiéreux. On voulait que ce soit vivant, loin d’un ton de conférence, mais plutôt dans la curiosité. Ça passe beaucoup par l’animatrice (Noémi Mercier puis Rose-Aimée Automne T. Morin) qui ne joue pas à l’expert, mais prend plutôt le rôle du téléspectateur. Puis, par le choix des historiens. Ils s’approprient la recherche et le texte synthétisé par l’auteur et y ajoutent leurs propres connaissances. Ça passe aussi par les animations qui servent parfois à contourner un manque d’archive et à amener de l’humour. Les textes sont importants entre la recherche et l’historien pour trouver ce ton. On fait de l’éducation sans être didactique.
Les premières saisons, il était question d’événements, de thématiques. Cette année, vous avez misé sur des personnages. Pourquoi ?
Notre mission est de continuer à surprendre. On cherche toujours un prétexte, un marchepied, pour parler d’histoire. Je pense aux noms des stations de métro. Lionel-Groulx par exemple. On les connaît dans la toponymie sans trop savoir qui sont ces gens. Ce sont des personnalités dont le legs est très complexe. Le défi est de rentrer dans le véhicule qu’on a qui est assez court. Avec deux personnages par épisode, ça passe vite. On souhaite aussi faire œuvre utile en présentant des empêcheurs de tourner en rond qui n’ont peut-être pas eu la reconnaissance qu’ils méritaient. Je pense à Éva Circé-Côté, première bibliothécaire de Montréal, qui a fait beaucoup pour que les femmes puissent avoir accès à une éducation gratuite.
Le Québec a une jeune histoire. Quelle période nous distingue particulièrement et mériterait d’être mieux connue aux yeux du monde ?
Je dirais que la 2e moitié du 20e siècle a été très importante. La Révolution tranquille nous a permis de déterminer notre identité québécoise. Mais à chaque époque, des gens nous démontrent que le Québec a été novateur et a réussi à s’inscrire dans le monde.
À quoi ressemble le travail de recherche pour un personnage ?
Je travaille avec Myriam Wojcik qui est notre historienne en chef (elle apparaît aussi à l’émission). Elle est géniale. Elle mène une équipe d’historiens-recherchistes qui ont une dizaine de jours pour monter un dossier sur un personnage. À partir de là, on sait où on veut aller. On mise sur des anecdotes, des clins d’œil, sur ce qu’il y a d’autre à dire en fonction de son époque qui pourrait nous faire sourire. Par exemple, pour parler du joual, on s’est penché sur l’origine du « r » roulé. Comme la télé est associée à l’image, on doit expliquer visuellement des notions. En vidéo, on est souvent limité. Il existe bien des gravures de certains personnages, mais pour d’autres, on ne sait pas tout à fait de quoi ils ont l’air. D’où l’importance de l’animation. On utilise aussi beaucoup d’archives de mise en contexte sur les villes, les lieux, les époques.
On est dans une ère de rectitude où il devient parfois délicat de revenir sur certains événements, d’utiliser certains mots. Comment jonglez-vous avec ça ?
Nous avons choisi d’adopter une posture assez neutre. On présente les faits dans leur ensemble. On ne cherche pas à occulter des faits. On fait attention aux mots. Certains ne sont plus appropriés. Nous sommes sensibles, sensés et ouverts. Il arrive que pour certains angles plus controversés ou sujets à débat, on passe par des invités très assumés comme ce fut le cas pour Louis-Joseph Papineau avec Biz. L’histoire, c’est quelque chose de vivant dont on apprend encore. Ignorer l’histoire entraîne une répétition des événements. Il faut savoir d’où on vient pour décider sur quel chemin s’engager et pour trouver des solutions. La crise du logement est un bon exemple. Elle ne date pas d’hier. Kebec a son importance dans un contexte où il y a beaucoup de désinformation. Nous proposons des bases solides, vérifiées.
► Kebec, lundi 19 h 30 à Télé-Québec.
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